Gracieuseté des archives d'Omer Cantin.
Note accompagnant le document: il faut faire attention à l'exactitude des dates mentionnées dans le texte. Comme la mémoire est une faculté qui oublie, il se peut que les dates soient quelques plus approximatives qu'exactes… (Omer Cantin, décembre 2021)
C’est en 1946 que la paroisse de Lac Sainte-Thérèse s’est dotée de l’église que nous connaissons tous aujourd’hui. Avant cette date, les paroissiens pratiquaient dans une première chapelle temporaire construite ou aménagée en août 1934 et plus tard dans une deuxième chapelle également temporaire aménagée en septembre 1937. Neuf ans se sont écoulés avant que la paroisse possède un lieu de culte permanent.
Pierre Cantin, dans un document qu’il a rédigé et daté du 8 novembre 2001, raconte comment la paroisse s’est dotée de ses premières chapelles et de son église actuelle. Voici son témoignage.
Lorsque nous sommes arrivés au lac Sainte-Thérèse en 1934, la chapelle était située près du lac. C'était une bâtisse en bois rond assez grande. Vu qu'il n'y avait pas d'école dans le temps, le bas servait pour la messe le dimanche et les offices religieux; sur semaine, ça servait pour l'enseignement. Le haut était divisé en deux. Les nouvelles familles qui arrivaient pouvaient y demeurer le temps de se trouver un lot et de bâtir.
L'école a été bâtie en 1935, a ouvert à l'automne au mois d'octobre.
Il y a eu quelques améliorations à l'église. Ils ont décidé de faire une place pour le chœur de chant dans le haut de la chapelle, le plafond a été coupé au-dessus de l'autel (une vingtaine de pieds carrés). Les chantres rendus en haut donnaient plus de place pour le monde en bas. Nous étions dans le temps à peu près 72 familles dans la paroisse.
En plus du chœur de chants dans le haut de la chapelle, il restait assez de place pour le curé : deux chambres à coucher et assez de place pour toutes sortes de choses. Dans le temps c'était le curé Brosseau, premier curé ici au lac Sainte-Thérèse. Un prêtre qui aimait bien ramasser toutes sortes de vieilles affaires. Il y avait deux chambres à coucher dans le haut de la chapelle, je crois qu'il n'a jamais couché là, car il n'y avait pas de place, c'était plein de toutes sortes de cochonneries. Les offices religieux ont continué encore quelques années dans cette chapelle.
Un peu plus tard, dans les années 1937-38, la paroisse avait décidé de bâtir un presbytère. Pour quelques années, le bas pourrait servir pour les offices religieux et le haut de résidence pour le prêtre. Ce qui a été fait. L'autel était en avant au centre du transept. Du côté nord était le chœur de chants et le côté sud servait de sacristie. Cet édifice est encore là aujourd’hui, c’est la maison de M. Gingras.
La construction de l'école ainsi que le presbytère a été bâti par monsieur Denis Charbonneau. Après que les offices ont commencé dans cette bâtisse, la chapelle près du lac a été démolie ainsi que ses dépendances, ce qui a du servir quelques années je crois jusque dans les années 1950.
Nous avons changé de prêtres de temps en temps. En 1948, c'était le curé Labelle qui était curé ici au lac Sainte-Thérèse. À peu près à six milles au sud de Hearst, il y avait une église qui ne servait plus, dans le rang des Slovaques, qui s'appelait Bradlo. Les résidents de cette concession avaient quitté leur lot, il n'en restait qu'un voisin de l'église.
L'évêque du diocèse avec notre curé a décidé de transporter cette église ici au lac Sainte-Thérèse. Il s'agissait de la soulever, de mettre des logs dessous et d'atteler un tracteur dessus, puis on s'en vient. Ce qui fut dit fut fait.
Deux hommes avec une team de chevaux ont coupé le bois ici au Lac sur la terre de la paroisse à la plage, l'ont chargé sur des sleighs et ces logs ont été transportées jusqu’à l’église de Bradlo avec le tracteur Ford 8N de Léopold Papillon, car on était au mois de novembre et il y a avait de la neige.
Nous étions six ou sept hommes. Les Bouchard (Paulo et Ti-Nours) s’ajoutent à la liste des paroissiens qui ont participé au déménagement. Nous avons commencé à lever l'église pour mettre les logs dessous. Il fallait que ce soit solide, pour pas que ça se démanche le long du chemin. Le curé Labelle avait un gros char. Nous voyagions avec lui matin et soir. Après huit ou neuf jours de travail, nous étions prêts à décoller.
Le curé Labelle et Ernest Cantin possédaient conjointement un tracteur D-7 pour faire de la terre pour les colons, ce qui n'était pas suffisant pour tirer l’église. Le garage Central, qui appartenait à Joseph Vaillancourt, qu’on surnommait «Jos» avait un D-6. Il était prêt à venir nous donner un coup de main. Le D-7 était attelé en avant et le D-6 était en arrière qui poussait. Avant de prendre le chemin avec ça, il fallait avoir l'inspection du département des chemins. Après avoir eu le O.K. du gouvernement, nous avons décidé un bon matin de prendre le chemin.
J’étais à l’intérieur de l’église et à un moment donné en traversant le champ qui appartient maintenant à Camiré, l’église a rencontré une roche dans sa progression et tous les soliveaux ont cassé sous le choc avant que personne n’ait eu le temps de rien faire.
Vu que nous ne pouvions pas passer dans la ville avec ça, il fallait en faire le tour. Rendu à la première concession l'autre bord de Hearst, nous avons tourné du côté est. Après avoir fait une couple de cent pieds, il y avait un crique à traverser sur lequel il y avait un pont. Après avoir arrêté, mesurer l'espace entre les logs sous l'église, on s'est rendu compte que les runneurs étaient plus larges que le pont. Après discussions, on s'est dit : «on va passer à côté dans le crique.
Le plus petit tracteur, le D-6 à essayer de traverser à l'eau. Vu que ce n'était pas assez gelé et que c'était dans la terre noire, c'était impossible de traverser à l'eau. Nous ne pouvions plus retourner. On a dit que personne ne reste dans l'église, on passe sur le pont; si ça verse, on la laisse là. Il n'y avait pas autre chose à faire. À notre grande surprise, ça passer de première classe et nous avons continué notre route jusque sur la terre de Adolphe Provençal et nous nous sommes rendus jusqu'à la ligne de chemin de fer. C'était notre première journée sur le chemin. Notre équipement a passé la nuit là.
Nous avions un permis pour traverser le chemin de fer, seulement il y avait les fils de téléphone et de télégraphe qui ne devaient pas être coupés. Les employés de ces compagnies étaient sur place. Ils ont démanché les fils sur cinq poteaux de long et baisser les fils sous la track après quoi nous sommes passés avec l'église. Eux, ils leur restaient à remettre les fils à leur place.
Après avoir traversé la track, on se trouve sur la route 11 qu'il fallait suivre jusqu'au garage Expert. De là, nous avons pris la route du Lac Sainte-Thérèse. Pour traverser les criques, à la place des calvettes qu'il y a aujourd'hui, c'était des ponts avec des gardes. Le passage où les gardes étaient trop étroits pour que l'église passe, il fallait que les gardes soient enlevées. Il y avait des hommes en avant qui démanchaient les gardes. Après que l'église était passée, d'autres hommes les remettaient en place.
Nous avons traversé la ligne de chemin de fer le matin et nous sommes arrivés au lac Sainte-Thérèse le soir, à la noirceur vers les six heures, après onze jours d'ouvrage à six ou sept hommes. C'était dans le mois de novembre. Il devait y avoir une vingtaine de pouces de neige. Le curé suivait l'église, ça lui arrivait assez souvent de rester pris et nous étions obligés d'aller le pousser.
Après que l'église fut rendue sur le terrain, à droite d'où elle est actuellement, elle a passé l'hiver là. Nous notre travail était terminé pour l'hiver. Au printemps quand la terre fut dégelée, la cave a été creusée, le solage a été coulé en ciment jusqu'à l'égalité de la terre. Ce qui dépassait de la terre a été fait en pierre des champs. Quand le solage a été sec, l'église a été montée dessus. Vu qu'elle était un peu longue, pour le coup d'œil elle a été coupée de huit pieds du bout arrière, juste avant le transept.
Un menuisier a été engagé pour conduire les travaux et les paroissiens qui étaient disponibles pouvaient se rendre au chantier où il y avait toujours de l'ouvrage à faire faire. On a ajouté un jubé à l’église, à l’arrière, avec des escaliers pour y monter. Maurice Bourgeois et Jean-Baptiste s’en sont occupés particulièrement. Je crois que la première année a passée à faire le dehors. La finition du dedans a dû être faite l'année d'après. Tous les étés entre les semences, les foins et les travaux de la ferme en général, il avait toujours un peu d'ouvrage à faire.
Les derniers travaux ont été faits en 1999. La tôle sur la couverture a été changée et le dedans a été peinturé. Depuis quelques années nous avons la messe seulement l'été du mois de juin au mois de septembre.
Comme je disais plus haut, il y a eu jusqu'à 72 familles dans la paroisse. Nous avions un prêtre résidant pendant plusieurs années. L'abbé Brosseau aimait visiter ses paroissiens. Il se rendait régulièrement chez l'un et chez l'autre, voir ce qui se passait, les encourager, parler avec eux. C'était un curé qui aimait beaucoup à rire.
La paroisse du lac Sainte-Thérèse a commencé à se peupler en 1925 avec l'arrivée de quelques familles. C'est dans les années 1930 à 1935 que la paroisse a vraiment grandi. C'était des gens qui venaient d'un peu partout de la province de Québec, des familles complètes.
La première école a été bâtie en 1935. L'année précédente, les enfants allaient à l'école dans la chapelle qui était située près du lac. C'était une chapelle construite en bois rond qui était utilisée pour les services religieux bien entendu, mais aussi on y faisait l'école, on y accueillait des familles en attendant que leur maison soit construite.
Nous étions beaucoup de jeunes dans la paroisse. Il y avait du travail sur les chemins quelques mois par année; faire des fossés, transporter de la glaise sur les terrains bas, construire des ponts, préparer les chemins pour recevoir la gravelle. Lorsque nous ne travaillions pas à l'extérieur, nous faisions de la terre neuve chez nous, coupions des branches, arrachions des souches. Nous avions toujours de l'ouvrage à faire.
Nous avons aussi appris à chanter plusieurs messes : la messe des anges, la messe du dimanche ordinaire, la messe de la Sainte Vierge, la messe du quatre ton, la messe des morts, une messe à deux voix, une autre à trois voix pour les grandes fêtes.
Je me souviens que nous avons été en ville chanter une messe, une fête qu'il y avait à la cathédrale de Hearst. Les gens avaient trouvé ça beau. Dans la chorale de Hearst, ils n'étaient que deux ou trois chantres. C'était différent d'avec nous. La première année que nous étions ici, il n'y avait pas de musique. Un de mes frères, Thomas qui était dans une communauté religieuse (les frères des écoles chrétiennes?), est venu passer une semaine chez nous. Il avait étudié le chant et la musique.
Près de l'église, il y avait un garage dans lequel était entreposé entre autres choses, deux vieux harmoniums qui ne fonctionnaient pas. Après les avoir examinés, Thomas a dit : «Ça se répare!» Nous avons été voir le curé et lui avons demandé si on pouvait les mettre en marche à condition d'en laisser un pour l'église et d'amener l'autre à la maison pour nous. Le curé a répondu : «Je ne demande pas mieux! Comme c'est là, pas un ne fonctionne, avec un pour l'église ce serait numéro un.» Ce qui fut dit fut fait. Les deux harmoniums ont été réparés et l'un des deux est venu chez nous.
Lorsque Thomas est retourné à Québec, il nous a envoyé un livre pour apprendre la musique. C'est là que j'ai commencé à piocher sur l'harmonium qui était chez nous. L'autre harmonium elle, quand elle a été réparée et installée à l'église, a été utilisée par une fille qui connaissait la musique. Elle a accompagné la chorale pendant les messes pour un bout de temps. Ensuite comme elle voulait être payée, elle demandait deux piastres par dimanche, le curé lui a répondu que la paroisse n'avait pas les moyens de la payer. Alors, elle a abandonné.
Le maître-chantre était au courant que j'avais commencé à pratiquer. Il m'a demandé si je pouvais jouer à l'église, même si c'était uniquement pour leur donner le ton. Il m'a dit quelle messe, nous chanterions le dimanche suivant, et c'est là que j'ai commencé. Ça faisait dur pendant les premiers mois, mais après un bout de temps, ça devait avoir du bon sens. J'ai continué à jouer jusqu'à ce qu'ils ferment l'église, même si j'ai continué à jouer à Saint-Pie-X par la suite.
Dans les années 1935-36, à Noël pour la messe de minuit, nous chantions le cantique Cloches tintées, voici Noël. C'était un chant à deux voix, un très beau chant. C'était pour remplacer le Minuit chrétien, qui, dans le temps, était un chant à l'index. Ce n'était pas permis de chanter le Minuit chrétien dans les églises; c'était défendu par les évêques.
Je me souviens l'avoir entendu chanter la première année de notre arrivée au Lac Sainte-Thérèse. C'est après ça qu'il a été interdit. Je ne l'ai jamais plus entendu chanter au Lac; l'église était fermée quand l'interdit a été levé.
Voici un résumé du trajet du démanagement de l'église.
Environ au total 30 kilomètres (18.75 milles).
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