Hearst... avant que Hearst n'existe

Hearst est aujourd'hui une ville majoritairement francophone du nord de l'Ontario. Cette petite ville de plus de 5,000 habitant survit aujourd'hui surtout grâce à la forêt.

Mais c'est du chemin de fer qu'elle est née. De la forêt, elle a grandi. Mais comme nous le voyons dans une des photo ci-jointe, les deux y sont encore omni-présent. Prise en 2020, cette photo nous démontre la gare de triage du chemin de fer, et le moulin à scie de Tembec, avec son brûleur (qui ne sert plus), et sa gigantesque grue pour manipuler les billots.

Une autre photo nous démontre la tour d'eau de la ville, avec, en arrière plan, un autre moulin, celui-là, de contreplaqué.

A l'entrée de la ville, sur la route 11, un autre attrait de la ville: la chasse, la nature. Hearst est la capitale canadienne de l'orignal. Depuis les années 1970, un orignal nous acceuille; cet orignal a changé à quelques reprises avec les ans, tout comme la ville.

La naissance

Je vous raconte aujourd'hui comment Hearst est "né". Ce passage commence en 1900, et ira jusqu'en 1922, année de l'incorporation de Hearst comme municipalité de l'Ontario.

Je vous avoue qu'une grande partie de l'information que je présente ici nous vient d'un article qu'Ernie Bies a écrit sur les début de la ville de Hearst; il en vaut la peine d'être lu. Cet article, July 1914 - Hearst Wiped out by Fire est disponible sur le web.

Au cas où le site http://ontariohistory.org/bies-ix.htm ne serait pas disponible, j'ai mis à votre disposition une version local de l'article.

J'ai aussi mis à votre disposition est une version traduite par Marlène Bélanger, publiée dans le journal Le Nord en 2014.

L'article d'Ernie est basé sur les feux de 1914, mais il y décrit aussi le début de la ville de Hearst.

Plusieurs des photos de cette page sont aussi issu de son article.

Commençons donc en 1900. La ville n'existait pas. A part les amérindiens, les aventuriers, les trappeurs et les chasseurs, la région n'habritait personne.

Le chemin de fer pan-canadien a tout changé. Au début du siècle, deux chemins de fer devaient se rencontrer dans cette région du nord de l'Ontario: le chemin de fer national transcontinental (NTR), et le Algoma Central and Hudson Bay Railway Company. Tout ne se passa pas comme prévu: d'abord, l'Algoma Central and Hudson Bay Railway Company devait s'y rendre le premier. Mais dû à une faillite (détails plus tard), la NTR y arriva le premier.

Cliquez sur ce lien pour un bref historique (surtout en photo) de la gare du NTR de Hearst.

[ajouter le lien...]

Une des première photo connu de Hearst, est celle d'une équipe d'arpentage de la NTR, traversant la rivière Mattawishkwia, en 1908, prise par un membre de l'équipe, John Subert Nelles. Cette équipe était dirigée par le Dr. Cotton. Elle était chargée de tracer la route de la voie ferrée, entre les rivières Kapuskasing et Kabinakagami.

Dans sa description de la photo, Ernie Bies nous dit que les membre de l'équipe devaient construire des radeaux lorsqu'ils devaient traverser des rivières.

Voici le texte original d'Ernie tel qu'il l'a écrit dans Facebook/Hearstory:

1908 Crossing the Mattawishkwia.

This is the oldest know photograph taken in the undeveloped Hearst area. It was taken by John Subert Nelles, a recent graduate from Civil Engineering at the University of Toronto. He was the Transitman on the survey crew that laid out the line for the National Transcontinental Railway between the Kapuskasing and the Kabinakagami Rivers in 1908. They had to construct rafts to cross rivers that they came to. The crew chief, Dr. Cotton, can be seen sitting on the raft. People of the First Nations had traveled this region for hundreds of years but these would have been the first southerners to visit the area that would become the town of Hearst three years later. Two creeks just east of Hearst were named after members of this survey party, John Subert Nelles, the transitman and his good friend Tommy McIwroth, an axe-man. Nelles had a camera and documented the progress of the survey crew that summer. Photo by John Subert Nelles courtesy of his grandson Steven Nelles. Survey Party 4 had previously explored the Mattawishkwia River area 1900 when 10 survey parties were tasked with exploring Northern Ontario investigating land, geological, timber and wildlife potential for future exploitation. The 1900 survey party consisted f land surveyor Alexander Baird, geologist Graeme M. Stewart and Timber estimator John McConachie.

Ernie Bies nous montre un sketch, qu'il a publié dans Facebook/Hearstory, nous démontrant le tracée du chemin de fer entre ces deux rivières. Remarquez que, en 1908, le chemin de fer arrêtait à Cochrane.

Pour cette arpentage, l'équipe avait voyagé jusqu'à Chapleau sur le chemin de fer Canadien Pacifique, pour ensuite suivre les cours d'eau en canots (et en effectuant plusieurs portages), pour se rendre à la rivière Kapuskasing. Le groupe est parti de Chapleau en mai 1908, et complêta l'arpentage la première semaine de novembre.

Leur travail était monumental. Il devaient désigner le tracé du chemin de fer, à travers les forêts et les rivières, en tenant compte des dénivellations le long du parcours. Ses dénivellations devaient rencontrer des normes très strictes.

Et ce, pendant qu'ils devaient couper un "sentier" d'environ deux mètres de largeur le long du parcour, et planter des poteaux à chaque trentaine de mètres pour démontrer le centre du chemin de fer...

-----

Ce n'était pas la première fois qu'une équipe d'arpentage venait dans la région. Ernie a écrit, dans son article sur Facebook/Hearstory, que, en 1900, 10 équipes d'arpentage avaient parcouruent le nord de l'Ontario pour évaluer cette région pour son pententiel minier, forestier, et agriculturel. Il a même nommé les chefs des différentes équipes.

Chaque équipe avait au minimum une personne en charge de l'arpentage, un géologiste, et une personne pour évaluer le potentiel forestier et agriculturel. Le group numéro 4 est celui qui a exploré la région de la rivière Mattawishkwia.

Le fait que deux chemins de fer devaient se joindre dans la région démontre qu'il y avait effectivement du potentiel!

La compagnie ferroviaire n'a pas chômée, puisque, un an plus tard, en 1909, nous avons une photo du droit de passage dégagé du chemin de fer NTR à la rivière Mattawishkwia.

Sous la photo, j'ai laissé le texte d'Ernie, traduit pas Marc Dupuis. Vous pouvez en lire les détails en cliquant sur la photo pour accédé à une version en plus haute résolution de la photo.

La NTR était responsable de construire le chemin de fer entre Moncton et Winnipeg, une distance de 1804 milles de voie ferrée. La voie ferrée comprenait plusieurs "points divisionaires", chacune de 120 à 130 miles l'une de l'autre. Cochrane était l'un de ces "points divisionaire". Hearst, ou plutôt ce qui deviendra officiellement (i.e. incorporé) Hearst en 1922, était le prochain, et s'appelerait initialement le Grant Division Point, en l'honneur de Gordon Grant, ingénieur en chef de la NTR.

Chaque point divisionaire devait avoir un bon approvisionement en eau, pour subvenir aux besoins de la locomotive à vapeur. Une rotonde ("Roundhouse", en anglais) était présente, pour faciliter le changement de direction des locomotives. Une gare, abritant son chef de gare et sa famille y était construite.

Dans le cas de Hearst, le gouvernement y voyait du potentiel; une équipe d'arpenteurs y fut envoyé pour planifier la base d'une ville.

Ce premier plan de la ville fut publié en 1911. Il comprenait 287 terrains à construire, variant de $75 à $150 (détails dans l'article d'Ernie).

A remarquer; sur la photo: l'orthographe du nom de la rivière... Aujourd'hui Mattawishkwia, elle était jadis Mattawishguia et Mattawishquia. Cette emplacement n'avait pas de nom; elle était connue sous le nom de site Mattawishkwia ou Mattawishquia ou Mattawishkwia près de la gare de Grant, situé à Grant Divisional Point, nom donné par la NTR au point divisionaire de l'endroit.

L'arpentage était sous la responsabilité du ministère des Terres, des Forêts et des Mines, dirigé par le ministre William Hearst.

En mars 1912, la NTR and changé le nom du point divisionaire Grant pour "Hearst" (même si ce n'était pas encore une municipalité); les documents concernant ce site ont donc prit le nom de "Hearst" (c'est la raison pour laquelle la photo du plan de la ville a le nom de Mattawishguia de rayé, en faveur de Hearst). Le prochain point divisionaire à l'ouest de Hearst prit le nom de Grant.

Un point à mentionné, et je cite l'article d'Ernie traduit pas Marlène: "Le ministère des Terres, des Forêts et des Mines était responsable de la création de nouveaux sites pour des villes et il a pris la liberté de les nommer d’après les ministres de l’époque. Ainsi en 1909, la nouvelle ville de Cochrane a été nommée d'après le ministre Silent Frank Cochrane. Son successeur William Howard Hearst (1864-1941) a reçu cet hon- neur en 1912, forgeant ainsi un autre lien entre les villes de Cochrane et de Hearst."

A noter que ce "village" a prit le nom de "Hearst", mais il n'était pas encore incorporé. L'incorporation viendra dix ans plus tard.

Voici le temps de mentionner en plus grand détails les feux de 1914

Hearst en feu!

Suivant l'arpentage des plans de la ville, la vente des lots de 1911, et l'accroissement de la population, plusieurs citoyens et propriétaires de lots s'inquiétaient des dangers de feu pour la nouvelle aglomération. Les rues furent déffrichées, mais pas les lots.

Ces inquiétudes furent partagées avec les dirigeants gouvernementaux (détails dans l'article d'Ernie).

En novembre 1912, l'arpentage de la ville fut aggrandie, mettant de nouveaux lots à la disponibilité des immigrants et travailleurs ferroviaires.

Cette même année (1912), les cantons de Way, Hanlan, Casgrain et Kendall furent arpentés. En 1913 des lots de fermes dans ces cantons furent vendu. Suivit le déffrichage, les branches sêches, et le brûlage des résidues de bois.

Le déffrichage ne se faisait pas comme aujourd'hui. Ils n'avaient pas de gros tracteurs et de niveleuses. A la place, ils avaients leurs bras, leurs haches, et leurs "bucksaw".

Les rues étaient donc pleines de souches. Nous pouvons le voir dans cette serie de photos, datant de 1912. Nous voyons clairement les souches sur la rue Front. Nous voyons aussi la proximitée des arbres aux bâtiments.

A l'arrière des bâtiments, nous pouvons voir des tas de branches.

Remarquez aussi les troitoirs en bois. Même pour traverser la rue; certains ne sont que quelques planches de largeur!

Tout était en bois.

Aucune brique, pas de béton.

Tels était la ville en 1912. Quelques édifices, entourées de forêts. Les rues encore pleines de souches.

En 1911, les villes de Cochrane, South Porcupine et Pottsville ont brûlées. De l'article d'Ernie Bies (traduit par Marlène Bélanger): "Le titre du Globe and Mail du 11 juillet 1911 citait : « LE NORD DE L'ONTARIO BALAYÉ PAR UN MUR DE FEU - Les villes de Cochrane, South Porcupine et Pottsville ont été rayées de la carte - les flammes s'étendent sur des cen- taines de milles. » L'article attribuait la catastrophe à la terrible chaleur intense, le manque de pluie et des coups de vent. C'était le deuxième feu à dévaster Cochrane en autant d'années en laissant 2 000 personnes sans abri."

Porcupine (différente municipalité que South Porcupine) subissa le même sort plus tard cette année-là.

En juillet 1913, c'était le tour d'Earlton de brûler. Les villes de Cochrane, Matheson, South Porcupine, Thornloe, Elk Lake, Heaslip, Charlton et Hearst étaient aussi entourées de feux, mais la pluie est venue à temps, et a aider fait éviter la catastrophe.

Le 16 juin 1914, un article du Globe and Mail de Toronto rapporte que dix magasins et neuf résidences ont été détruite par un feu à Hearst. Mais une pluie a aider à contrôler le feu.

Par contre, un mois plus tard, les nouvelles étaient différentes. Un article de la Presse canadienne déclare: "LA VILLE DE HEARST ANÉANTIE PAR UN INCENDIE - Tout ce qui reste sont les bâtiments de la ligne du chemin de fer du Grand Trunk Railway.", incluant la gare, et la rotonde.

Les installation de l'Algoma Central and Hudson Bay Railway Company ont été épargnées, étant situées quelques milles à l'ouest de Hearst.

Serge Morissette, dans le groupe Facebook/Hearstory, a compilé quelques articles de l'époque. Les voici, en format PDF.

Un train est venu chercher les gens pour les ramener à Cochrane temporairement. Une photo de l'évacuation est incluse. Ces colons avaient tous perdu. Sur la photo, nous pouvons aperçevoir la ligne télégraphique qui suivait la voie ferrée.

Je ne sais pas de quelle gare il sagit dans la photo.

300 personnes furent évacuées à Cochrane. De 400 à 500 personnes étaient sans abri.

L'article d'Ernie Bies en donne plusieurs détails.

Les résidents sont revenu, et la ville fut reconstruite.

En 1916, un autre feu menaça la ville. Les flammes s'arrêtèrent à moins de 100 pieds de bureaux gouvernementaux de l'Ontario.

Incorporation de Hearst

Les armoiries de la ville reflètent le renouveau de la ville suite à ces feux. Encore, citant l'artice d'Ernie: "Le phénix sortant des flammes qu’on peut voir sur les armoiries de la ville de Hearst, symbolise la persévérance de la ville qui a survécu à deux incendies désastreux."

Le ministre des des Terres, des Forêts et des Mines, William Howard Hearst, fut premier ministre de l'Ontario de 1914 à 1919. Le 3 août 1922, la ville pour qui porte son nom fut incorporée par le Conseil des chemins de fer et des municipalités de l'Ontario.

Le premier maire de Hearst fut Gus McManus, frère du premier maire de Cochrane ( incorporé en 1909).

Autre fait intéressant: le quartier de St-Pie X, dont la paroisse fut créée en 1955, et amalgamé à Hearst en 1973, s'appelait jadis McManusville... c'est le quartier où Augustine (Gus) McManus avait acheté les premières terres de cette endroit.

Voici donc comment Hearst est "né". Pendant la construction du chemin de fer, quelques miliers de travailleurs demeuraient à Hearst. Mais ça n'a pas duré très longtemps, puisqu'ils ont continué vers l'ouest, vers le nouveau point divisionaire Grant, qui, aujourd'hui, n'existe plus.


Tout droits réservés / All rights reserved,
claude@ccantin.ca, https://ccantin.ca.